Cinéma - Sunset Blvd. de Billy Wilder (1950)

Ce film est mythique, bien qu’un peu passé de mode. Et pourtant j’ai mis du temps à le voir, sans doute effrayé par le mythe. Car l’intrigue se passe dans un Hollywood bien réel qui se retourne alors sur son passé. Et il était parfois peu glorieux.

Le film s’ouvre sur la mort d’un scénariste dans la piscine d’une grande villa de star sur… Sunset Blvd., l’un des cœurs d’Hollywood. Puis le narrateur compte son histoire, celle de Joe Gillis (William Holden), scénariste sans le sou, poursuivi par des créanciers qui se retrouve par hasard dans la villa d’une star du muet, Norma Desmond (Gloria Swanson) vivant toujours dans le souvenir de sa gloire avec son majordome (Erich Von Stroheim). Dans cette rencontre, Desmond trouve l’occasion de montrer le scénario qu’elle a écrit pour son «retour» et Gilllis l’occasion de se faire payer pour corriger ce scénario. Mais tout ne pouvait être aussi simple…

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Un peu comme «Chantons sous la pluie», le film se penche sur son passé, celui du cinéma muet, définitivement enterré dans les années 30. Gloria Swanson y livre une prestation bouleversante car elle y joue un peu d’elle même. Star du muet, elle ne parvient pas à passer le cap du parlant malgré une voix et une présence incroyable. Histoire de style pensait-on à l’époque, ou star devenue incontrôlable ? Mais dans ce rôle, elle se rappelle au bon souvenir de cette industrie qui aime tant refaire et piétiner son passé. En choisissant le métier de scénariste pour l’autre héros de l’histoire, Wilder et ses co-auteurs insiste justement sur les mots et sur ceux que l’on oublie déjà trop souvent. Il montre l’envers du décor de cette usine à films, les petits rouages, le long travail pour arriver à cette pellicule qui défile devant une ampoule. Oscillant entre le drame et la comédie de moeurs, le film reste un thriller des plus noirs. On se doute évidemment très vite que Gillis est le cadavre dans la piscine car on reconnaît la villa de Norma Desmond. Mais alors, que s’est-il passé ?

Wilder charme forcément la profession en parlant d’elle et on retrouvera cela avec d’autres films plus moyens (La La Land, par exemple). Ici, l’histoire est au niveau du reste. Holden a le charisme qu’il faut, presque trop pour ce simple scénariste oublié (mais il devint une star après). Stroheim livre encore une prestation impeccable dans ce rôle plus complexe qu’il n’y paraît où l’on peut voir une part de Wilder. Et puis il y a des cameos et apparitions de personnages bien réels, comme le réalisateur Cecil B. DeMille, la reine des potins Hedda Hopper ou encore Buster Keaton. Paradoxalement, on se prend presque d’affection pour cette Norma Desmond un peu folle qui trouve le cinéma maintenant «trop petit» et elle «trop grande». Deux scènes sont marquantes : Celle où le vieil éclairagiste met Norma à nouveau dans la lumière et tous les acteurs et techniciens reviennent autour d’elle, et le final…mais je n’en dirai pas plus. Gillis n’attire pas la sympathie avec ses mensonges et sa médiocrité, même s’il est tiraillé entre bons et mauvais sentiments. On a compris, Wilder, qui arrive peu à peu à son sommet, regrette le peu de mémoire dont fait preuve la profession et les «cadavres» laissés dans les placards, tout autant que ce star system qui essaie de protéger ses stars mais les enferment dans des bulles totalement artificielles qui mettent en danger la santé mentale de celles-ci.

Pour cela, il fait appel à son directeur de la photo John F. Seitz qui sait vraiment y faire pour que Gloria Swanson apparaisse dans toute sa grandiloquence et son éclat. La musique est très aussi importante avec Frank Waxman aux commandes pour appuyer la dramaturgie de certaines scènes. Évidemment, on peut aussi regarder ce film avec l’impression passéiste de tout film des années 50. Mais justement, il rappelle aussi que l’on peut évoluer sans oublier. Si sur ce thème, il n’est pas mon préféré, il reste par contre un grand film noir qui marque pour son atmosphère et sa dramaturgie et permit un come-back pourtant éphémère de sa star. Incontournable !

Ce film fait partie du challenge IMDB Top250 Une bande annoncevideo


Ecrit le : 29/11/2013
Categorie : cinema
Tags : cinéma,film,classique,1950s,cinémathèqueidéale

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