Géopolitique - Asie du Sud-Est, incertitudes et révoltes

Après plusieurs décénies d’accalmies relatives, l’Asie du Sud-Est semble prise dans une tourmente bien plus grave que la mousson annuelle. La semaine dernière, Thaïlande et Cambodge se sont invités à nouveau dans l’actualité avec émeutes ou manifestations contre les régimes au pouvoir. La Birmanie est toujours en proie à des émeutes ethniques, tout comme le Bangladesh. Hasard ou coincidence ?

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Avec la chute du bloc de l’est et l’ascension de la Chine, la donne a beaucoup changé dans cette région. L’influence de la Russie communiste est devenue faible, voir à disparu. L’ouverture économique de ces pays les a fait basculer dans l’économie de marché, le tourisme à outrance et ils sont devenus aussi à leur tour les “ateliers du monde”. Au point qu’ils deviennent soient concurrents de la Chine, soient sous-traitants pour les entreprises chinoises. Il est pourtant faux de mettre toute cette zone dans une globalité, chaque pays ayant ses spécificités politiques et économiques. Ainsi les Philippines sont-elles liées aux Etats-Unis tandis que Le Vietnam a une relation amour-haine avec la Chine. La Birmanie reste une dictature qui s’est vue forcée de s’ouvrir vers l’occident mais hésite encore sur la voie à tenir. Le Bangladesh est un carrefour entre l’influence indienne et l’influence sino-thailandaise, ballottée par les catastrophes naturelles. Le Cambodge sort peu à peu de son histoire tumultueuse et se retrouve coincé entre l’influence thai et la présence grandissante de son voisin vietnamien.

Mais au milieu de tout cela, il y a la situation géographique privilégiée de toute cette zone. En effet, entre les deux puissances en devenir que sont Inde et Chine, il y a des trajets maritimes alimentant le monde entier et donc des ports et hubs aériens. Qui dit commerce, dit aussi transit de matières premières. Le projet de Gazoduc TAGP (trans-ASEAN Gas Pipeline) est justement un enjeu majeur entre ces pays de l’ASEAN ( Indonésie, Malaisie, Philippines, Singapour,  Thaïlande , Brunei , Viêt Nam , Laos, Birmanie, Cambodge ). Le projet est composé de différentes branches qui doivent s’interconnecter. Parallèlement à cela la Chine développe un Gazoduc avec les pays d’Asie Centrale.

Comme on peut le voir sur la carte, le Cambodge et la Birmanie (Myanmar) ne sont pas encore raccordés à cette infrastructure. Pour le premier, cela est en finalisation tandis que pour le second, c’est en négociation, sachant que des sociétés pétrolières occidentales sont en phase d’exploration. Il existe pourtant des échanges entre ce pays et la Thailande voisine.  La Chine n’a pas encore d’interconnexion avec ce réseau, même si dans les documents du projet, cela est évoqué. Or, les besoins énergétiques deviennent énormes dans cette zone et pour la Chine. En perdant peu à peu de son influence sur la zone, elle se voit éloignée de cette source énergétique. D’où les récents conflits territoriaux et sa manière de “montrer les muscles” face au Japon, Vietnam et Philippines.

Doit-on pour autant y voir un lien avec les émeutes en Cambodge et Thailande ? Oui et non. Il n’y a pas de lien fort entre le régime de Pekin et les régimes en place. Le PPC au Cambodge reste très orienté vers la Chine et Hun Sen a souvent voulu faire pencher L’ASEAN vers la Chine plutôt que vers des puissances occidentales. Face à Hun Sen, l’opposition s’affiche plutôt favorable à l’influence Etats-Unienne. La Thailande et le Cambodge ont d’ailleurs des conflits frontaliers et jusqu’à présent la Thailande avait une influence clairement américaine. Pourtant le régime actuel n’est pas bien vu par la diplomatie américaine, comme l’ont révélé des fuites de l’ambassade US à Bangkok. Mais l’opposition est menée par un parti conservateur et libéral. L’instabilité de la Thailande permettrait également que d’autres solutions commerciales soient privilégiées dans la région, notamment celle où les pays sont “pro-chinois”. L’hésitation des états-unis sur le cas Thailandais est donc importante après des années d’instabilité politique dans le pays.

Si ces révoltes ne sont pas fomentées par les grandes puissances, elles restent malgré tout sous leur surveillance pour des raisons bien éloignées du bien-être des populations. Zone d’avenir pour l’économie mondiale, l’Asie du Sud-Est ne parvient pas à s’unifier politiquement pour s’isoler de ces influences. Il est donc autant possible que la zone devienne le terrain de conflits armés comme d’un développement économique et social important.

After several decades of relative lull, the South-East Asia seems stuck in a far more serious storm than the annual monsoon. Last week, Thailand and Cambodia were back in the news with riots and demonstrations against the ruling regimes . Burma is still plagued by ethnic riots , like Bangladesh. Chance or coincidence ?

With the fall of the Eastern bloc and the rise of China , the situation has changed a lot in this area. The influence of Communist Russia became weak or gone. Economic openness of these countries make them fall into the market economy, the excessive tourism and they have also become  the “ workshop of the world” . They either become competitors of China or subcontractors for Chinese companies . Yet it is wrong to put all this in a whole area , each country has its own political and economic characteristics. The Philippines are  linked the United States while Vietnam has a love-hate relationship with China. Burma remains a dictatorship which was forced to open up to the West, but still reluctant to take on the road . Bangladesh is a crossroads between the Indian influence and the Sino- Thai influence , and under natural disasters . Cambodia is gradually emerging from its tumultuous history and finds himself caught between the Thai influence and the growing presence of the Vietnamese neighbor.

But amidst all this, there is the privileged location of this whole area. In fact, between the two powers that be are India and China, there are sea routes feeding the world and therefore ports and air hubs. Who says trade, also says transit commodity . The pipeline TAGP (Trans- ASEAN Gas Pipeline) project is just a major issue between the ASEAN countries (Indonesia, Malaysia , Philippines , Singapore, Thailand , Brunei, Vietnam , Laos, Burma , Cambodia) . The project is composed of different branches that need to interconnect. At the same time China is developing a pipeline with the countries of Central Asia.

As we can see on the map , Cambodia and Burma (Myanmar) are not yet connected to this infrastructure. For the first one, it is being finalized while the second is in negotiations , knowing that Western oil companies are in the exploration stage . But there are trade between that country and neighboring Thailand . China does not interconnect with the network , although in the project documents , it is mentioned. But energy needs become huge in this area and for China. Gradually losing its influence on the area , China was away from this energy source. Hence the recent territorial disputes and the way to “show muscles “ against Japan , Vietnam and the Philippines.

Must we therefore see a link with the riots in Cambodia and Thailand ? Yes and no. There is no strong link between local government and Pekin regimes. Cambodia Popular Party in Cambodia is very oriented to China and Hun Sen has often wanted the ASEAN to look to China rather than Western powers . Faced with Hun Sen, opposition appears rather favorable to US influence . Thailand and Cambodia have also border disputes and so far Thailand was a clear American influence. Yet the current government is not well seen by American diplomacy , as revealed leakage of the U.S. Embassy in Bangkok. But the opposition is led by a Conservative and Liberal party. Instability in Thailand also allow other commercial solutions to be preferred in the region, including  “pro- Chinese “  countries. The U.S. reluctance on the Thai case is so important after years of political instability in the country.

If these revolts are not instigated by the major powers , they are nevertheless under their supervision for reasons far removed from the well-being of populations. Area for the future of the global economy, Southeast Asia is unable to unite politically to isolate these influences. It is equally possible that the area will become another war territory as an important economic and social development area.


Ecrit le : 21/01/2014
Categorie : geopolitique, english
Tags : asiedusud-est,Geopolitique

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