Cinéma - Suffragette de Sarah Gavron (2015)

Parce que le Cinéma est à la fois un reflet de la société et une démarche artistique, il contient souvent un message politique. Je reprends donc quelques chroniques cinéma ponctuelles lorsque le sujet le mérite. Ce film de Sarah Gavron est un bon exemple.

Pour ceux qui ne connaitraient pas ce que sont les “Suffragettes”, il s’agit du nom donné aux  anglaises qui militaient pour le droit de vote des femmes à la fin de 19ème siècle et au début du 20ème siècle. Le film sorti en Octobre/Novembre retrace un évènement qui fera basculer définitivement la cause sans aboutir immédiatement à un résultat . Nous sommes en 1912 et les droits des femmes sont bien loin de ceux que nous avons aujourd’hui, pourtant bien inégaux.

affiche

Ce film, sans être remarquable par sa forme, est une jolie introduction à un sujet qui devrait être rappelé sans cesse. On oublie que le droit de vote des femmes n’a été accordé en France qu’en 1944, en Turquie en 1934, en Sierra Leone en 1930, en Angleterre en 1928, en Belgique en 1921, aux États-Unis en 1920, en Russie en 1917, au Danemark en 1908, en Nouvelle Zélande en 1893 ! Combien de femmes ont dû lutter pour cette cause, ont été moquées, emprisonnées et en sont mortes ? Des milliers, et même des millions s’il on compte toutes celles qui se battent encore aujourd’hui. Le sujet est donc toujours d’actualité, à l’heure même où des pays proches de nous remettent en cause des droits fondamentaux.

Mais l’autre intérêt du film est dans le parcours qui est présenté, celui d’une héroïne d’abord spectatrice de ces actions avant de se retrouver actrice par hasard. Le film réussit-il à montrer que tant que nous ne sommes pas touché directement, nous ne faisons pas grand chose alors qu’une poignée d’individus désintéressés lutte ? Pas sûr…. Pourtant, la réalisatrice utilise la figure d’un policier pour démontrer cela. Défenseur de la loi, il est aussi touché par cette lutte, lui qui a vu tant de femmes battues, bafouées, sans que la loi ne permette quelque chose. Il se retrouve ainsi à essayer de protéger ces femmes tout en obéissant aux ordres. Une phrase résonne particulièrement aujourd’hui lorsqu’ils parlent de ces “meneuses”, ces riches femmes éduquées qui manipulent les femmes sans éducation pour en faire de la “chair à canon”. Étrange écho à un autre phénomène, mais les révolutions sociales se sont faites parfois de la même manière que des actes de terrorisme barbare.

Que cela soit sur l’esclavagisme, la peine de mort, le droit de vote des femmes, les progrès se sont fait à contre-courant de l’opinion publique majoritaire, par la volonté de quelques hommes et femmes mais surtout de militants qui se sont sacrifiés pour des causes. Ce sacrifice n’aurait pu aboutir sans le lobbying d’autres militants à un plus haut niveau. Sur cette part, le film est incomplet et ne montre par qu’en plus de Mrs Pankhurst et son WSPU, il y avait eu d’autres types d’action, comme celles du WFL, dissidence créée en 1908. Aujourd’hui, nous avons l’impression que la société est plus passive que celle de l’époque. La lutte des classes et la violence qui est montrée dans le film paraît loin aujourd’hui alors qu’elle revient de plus en plus. Pour preuve, des lois telles que le travail du dimanche qui peu à peu reviennent à gommer ce qui avait été écrit à … cette époque (1906 en France), pour des raisons sociales et religieuses.

Un film qui, sans réussir à tout retranscrire de cette histoire, amène des éléments de réflexion que chacun devrait avoir pour comprendre à la fois la chose politique, le militantisme et donc… sa propre époque.

Suffragette, par Sarah Gavron, sur un scénario d’Aby Morgan avec Carey Mulligan, Helena Bonham Carter, Brendan Gleeson, 106 minutes.

En video : video


Ecrit le : 02/12/2015
Categorie : cinema
Tags : angleterre,Cinéma,droitdevote,féminisme,histoire,politique

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