Blog - Pourquoi écrire ?

Cela fait longtemps que je me pose cette question, surtout dans un monde où l’écrit reste menacé par le tout image, l’éphémère.

Récemment je lisais un bouquin de Cetro, un auteur “amazon” que je ne conseillerai pas forcément, malgré un talent certain (pour résumer, c’est caricatural, peu crédible, limite misogyne mais il y a un style…). Il a écrit aussi sur un blog et un article m’a interpelé. En effet, je me suis un peu retrouvé dans ses expériences scolaires et ça doit forcément avoir un rapport avec le “besoin” d’écrire.

Avant de revenir sur ce qu’il dit, je vais parler de moi, d’abord. J’ai été un lecteur précoce grâce à mes parents qui m’ont encouragés et j’ai bien vite voulu lire autre chose que ce qu’on me proposait pour “mon âge” en primaire. A vrai dire, je m’ennuyais en primaire et la facilité que je rencontrais alors, a fini par m’enfermer dans un petit confort suffisant, peu à peu jusqu’à l’échec au lycée. Mais cet amour de la lecture et de l’écriture, je l’ai vu disparaître quand justement on a commencé à “étudier” des textes. Autant j’ai eu des professeurs qui m’ont conforté dans mon amour des histoires, des mots, de la poésie, autant d’autres m’ont dégouté par les carcans imposés.

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Saint Paul à son bureau par Rembrandt

Cetro dit “le programme scolaire de français tel qu’il était appliqué a presque réussi à me dégoûter d’auteurs qu’aujourd’hui j’adore”. Je n’irai pas forcément jusque là mais si j’ai lu du Sartre, du Shakespeare, du Molière, du Maupassant, du Zola, ce n’est pas toujours grâce à l’enseignement. “Cette manière de décortiquer les classiques phrase par phrase, presque mot par mot pour tenter d’y voir l’intention de l’auteur… “ c’est justement ignorer totalement l’acte d’écrire, cette magie que l’on rencontre. Si je m’auto-analyse, je ne retrouverai jamais l’intention cachée dans mes écrits . Il ne faut pas croire qu’une phrase isolée est une intention car il y a autant de manières d’écrire que d’auteurs. Parfois cela vient d’un jet, d’autre fois c’est un accouchement douloureux jusqu’aux larmes. On peut entrer dans une sorte de transe pour être son personnage, dans l’atmosphère du récit. D’autres vont avoir des intention dans une phrase mais moins sur d’autres…

C’est aussi une douce alchimie qui répond au lecteur, à ses expériences et à peine couché sur le papier ou l’écran, le texte ne nous appartient plus, même ici sur un blog. Ma consœur blogueuse et poétesse Barbara nous abreuve de textes très personnels et je les prends comme un tout, avec les sonorités, les choix de mots, les atmosphères. Je les interprète sans doute différemment d’elle et je sais que mes propres textes m’échappent parfois en les relisant quelques années après. Je prends très simplement du plaisir dans les méandres de ces mots, parfois complexes. Je m’amuse à chercher de petits instants par une économie de mots et j’avais fait un exercice intéressant dans ce sens avec Péhä (voir mes créations) : Du mot à l’image puis de l’image au mot… Si je continue à mettre les “instants d…” à chaque saison, je n’ai pas traité assez de textes écrits auparavant pour les “pause poésie”, ce qui devrait remplacer “Ma BD” mi-2019. Mais ces instants ne deviennent plus mien à la seconde où ils apparaissent ici. N’en déplaise à mon camarade Cascador qui écrit pour lui et s’étonne d’interprétations, on peut froisser autant que toucher par seulement quelques mots. Heureusement, l’exercice du blog permet la correction que le roman ne permet pas.

Écrire reste un plaisir, une évasion, un moyen presque thérapeutique. Je suis avare de mots dans la vie réelle ou je donne le change sinon par l’humour. Alors sans doute que l’écriture me permet de me décharger de certains poids. Il y a sans doute un peu de revanche aussi de cette période scolaire qui me fit voir l’écriture comme un outil et non une passion. Si je partageais quelques goûts avec mon prof de première, il a quand même réussi à tuer en moi toute envie de lire la Princesse de Clèves dont il était amoureux fou. Paradoxal, non? Je pourrais faire le parallèle avec ces critiques cinéma qui pensent plus à faire des théories fumeuses sur les films qu’à simplement les regarder et les vivre. Je préfère lire et relire les entretiens de Truffaut avec Hitchcock que les chroniques de certains dans Libé, Télérama ou Positif. La culture étalée façon confiture devient indigeste et pourtant il faut bien un peu de sucre dans cette vie acculturée. Il n’y a qu’à voir le classement du “box office” 2018 en France pour se prendre un coup de déprime.

Et justement, c’est un peu pour ça que j’écris finalement, pour retrouver autre chose que ce que je peux lire et voir partout. Dans un monde où on nous oriente vers ce que nous aimons déjà à coup d’algorithmes et de moteurs de recherche intrusifs, je continue à faire un mélange des genres qui n’a pas grand sens. Le billet du samedi pour les humeurs, le vécu et les autres pour les sorties, les souvenirs. Mais comme je disais dans un ancien billet, il faut être soi dans un blog et ne pas essayer de faire du pseudo journalisme, de la critique acide systématique ou jouer un rôle, ça finit par se voir. Mais écrire de façon plus générale, c’est un acte de partage et une part d’exutoire et d’ego. On pourrait dire que celui qui écrit a un petit truc qui cloche ? Non, pas forcément. Quand il s’agit d’articles ou ouvrages purement techniques, il s’agit bien de partager de l’expérience. Parmi mes collègues blogueurs qui passent parfois par là, chacun a une ou plusieurs raisons bien à lui, inavouable même à soi même.

Si Cyrille parlait récemment de ce besoin de ne rien rater que beaucoup d’humains ont dans l’utilisation des flux RSS, des réseaux sociaux, il y a une sorte de drogue de l’écriture qui s’installe. Ce n’est pas linéaire avec des moments de “production” intense où tout paraît facile à écrire et pourtant pas forcément bon. Avec plus de 10 ans à avoir tenté plein de choses, j’ai enfin réussi à atteindre un rythme de croisière où je corrige, je jette, je rajoute avant de sortir le truc. J’étale, je planifie, je ne fonctionne plus dans l’urgence, l’immédiat. C’est un peu comme la consommation d’actualité, finalement dont je m’éloigne. J’ai supprimé les sites d’information de mes flux RSS comme j’ai arrêté de réagir partout et c’est bien plus productif. Cela sera l’occasion d’un billet la semaine prochaine…Mais j’ai besoin de manière régulière d’écrire, que cela soit en trois phrases d’un Haiku ou à travers une chose qui me passionne, m’émeut, en essayant d’être original. Quand je vais regarder l’année avec les chroniques musicales et cinéma, je ne verrai pas les grosses sorties qui parfois m’ont touchées pourtant. Je trouve cela inutile. Et même si je ne suis pas fan de progressif, j’aime , par exemple, picorer les chroniques de mon confrère Alias, parce que justement elles me sortent de mon petit monde. Écrire c’est aussi ce moment d’évasion.

Car pendant l’acte d’écriture, je me retrouve seul face à un écran, souvent dans le plus parfait silence, parfois une musique qui isole du brouhaha du monde. L’idée même de l’article arrive rarement à un moment propice, souvent loin de l’écran. Mais écrire, c’est être ailleurs, même pour un tutoriel. C’est imaginer être à la place de l’apprenant, de l’élève, de celui qui cherche une information. Pour la critique, je suis à la place de celui qui n’a pas encore vu, pas encore entendu, celui qui hésite peut-être, qui n’aime pas à priori et que je dois convaincre sans décevoir. Pour l’article du samedi, c’est encore autre chose, toujours différent, comme une conversation avec moi même. Et pour ceux qui hésitent, il faut essayer, au moins pour soi-même, se lire, se relire après un long moment, s’étonner de ce moment passé et recommencer, progresser, et puis un jour peut-être, faire lire. Je dois dire que dans ce cheminement, l’usage des forums m’a aidé, sans doute, sans verser dans le trollisme, bien entendu. C’est une prise de parole public qui donne confiance, mais qui peut mener d’autres à l’image, où écriture il y a aussi, d’ailleurs. Mais je parle de forums où l’on savait écrire correctement, si vous voyez ce que je veux dire.

Et là, vient le moment fatidique de tout texte écrit : La conclusion. Ici, je ne résumerai pas les quelques raisons énoncées avant. Ca sera plus à mes lecteurs et collègues de répondre (ou pas) à ces interrogations et hypothèses. Mais là aussi, répondre trop rapidement est parfois dommageable. Je le fais malheureusement trop moi même. Il va vraiment falloir ralentir…(à suivre)

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Ecrit le : 27/10/2018
Categorie : reflexion
Tags : écriture,blog,lecture,Réflexion

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