Littérature - Ubik de Philip K. Dick (1966)

Voilà une des œuvres les plus connues du prolifique Philip K. Dick, classé dans la catégorie Dystopie. Mais en est-ce vraiment une ?

Oh, On peut disserter.. Je m’étais sans doute fait une fausse idée de ce livre avant de le lire, basé sur diverses interprétations. L’oeuvre est complexe, parfois inégale, riche en rebondissements, aimant perdre son lecteur dans un but finalement bien précis…jusqu’à la dernière page.

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Nous sommes en 1992, une époque qui n’a rien à voir avec notre 1992 mais qui aujourd’hui pourrait très bien être située en 2092..L’Humanité a colonisé la lune. Les humains ont développé des pouvoirs psychiques, notamment les precogs qui prévoient l’avenir. D’autres ont des pouvoirs anti-psy pour contrer les premiers. La société est hyper-capitaliste, laissant certaines actions à des robots, tout étant devenu payant, même les besoins les plus élémentaires. Glen Runciter dirige sa société d’anti-psy. Sa femme est cryogénisée et maintenue en semi-vie. Un de ses employés lui ramène une certaine Pat, anti-psy d’un nouveau genre conseillée par un ami à lui. Ils obtiennent un contrat de rêve avec un des milliardaires les plus puissant. Et soudain tout bascule…

Rien que faire ce petit résumé est une épreuve pour ne pas trop en dire et en dire quand même assez pour comprendre où on met les pieds. Le monde représenté est un futur proche vu par un homme des années 60. Les ordinateurs peuvent paraître archaïques et on ne parle pas de mise en réseau, juste de visiophonie. C’est aussi le fruit de ces années où l’on faisait des recherches sur les drogues, pour mieux comprendre les possibilités du cerveau humain.

J’ai d’abord subi le livre, comme une plongée violente avec beaucoup de termes, antipsi, précog, conapt , pas vraiment de héros tout d’abord, un univers pas totalement décrit physiquement, des personnages qu’on ne prend pas le temps de présenter en profondeur…on finit par s’y faire malgré tout, par voir se construire cet univers, où devrais-je dire ces univers tant la perception semble différente entre les personnages. Il y a cette dualité entre la société de Runciter et son rival Hollis, qui emploie des pouvoir Psy. On voit que tout cela serait régulé plus ou moins par une entité supérieure mais ce n’est pas trop précisé. Alors on imagine ce monde oppressant où la moindre action semble payante jusqu’à empêcher de vivre. Vient Joe Chip, qui en devient le héros, ou le anti-héros. C’est le loser type, plutôt asocial, limite ermite parfois et en même temps flambeur. D’ailleurs les seules descriptions de cet univers sont surtout sur les vêtements, colorés, fantasques, exubérants.

Je me suis fait embarquer dans cette histoire finalement, même si je m’y suis perdu plusieurs fois. Il y a des personnages intrigants, comme cette Pat Conley qu’on peut croire être la clé de tout. Il y a Elle, la femme de Runciter, dont on essaie de comprendre l’histoire de cette semi-vie. Rien que sur cette forme de prolongation de la vie après la mort, Ubik vaut le détour. Mais ce n’est pas le seul thème cher à la science-fiction. On y parle de mondes parallèles, de paradoxes temporels, de voyages dans le temps, dans l’espace. Et dire que tout ça tient seulement en moins de 300 pages. Et puis il y a ce titre, Ubik, avec des slogans publicitaires pour des produits Ubik à chaque tête de chapitre. A force, on se demande ce que cela fait là, jusqu’à comprendre…

Comme je le disais en introduction, je pourrais passer des heures à en parler parce que Dick donne juste une trame minimaliste à son histoire pour laisser l’imaginaire du lecteur faire le reste. Il y a énormément d’éléments mais aussi de trous que l’on peut s’amuser à remplir. Est-ce finalement une sorte de pierre angulaire de son oeuvre ? En tout cas son influence est considérable sur la science-fiction moderne. Vous avez sans doute des termes qui vous reviennent en mémoire dans des films.

Finalement il est plus accessible que d’autres dystopies comme Fahrenheit, le meilleur des mondes, 1984…ou la Servante écarlate. Enfin en apparence car ce n’est pas seulement une dystopie, sinon dans cette dimension ultra-capitaliste. Il faudrait analyser cette oeuvre vis à vis du contexte politique de son écriture, comme toutes les dystopies. Une oeuvre majeure de la science-fiction, donc, même si je ne suis pas sûr qu’il faille commencer PK Dick par cela.


Ecrit le : 21/07/2020
Categorie : litterature
Tags : littérature,science-fiction,1960s,roman

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