France - A l'Assemblée Nationale, tous perdants !

La première séquence d’examen du projet de loi sur la Retraite qui vient de se terminer n’est pas vraiment à la hauteur des espoirs. Et au final, c’est un peu tout le monde qui a perdu.

Les premiers perdants sont … les français qui espéraient y voir plus clair sur leur retraite. Non seulement le gouvernement s’est évertué à mentir, changer d’avis, rustiner le projet mais pour quelque chose qui semblait préparé depuis les élections présidentielles, on voit de l’improvisation continue et un manque de transparence. Au point que cela est devenu sans queue ni tête pour les annuités selon l’age pair ou impair ! Pour ceux qui espéraient un vote contre, c’est du même genre que lors du projet de loi contre la corrida : Pas de réelle discussion mais des amendements d’obstruction, le ridicule en moins.

Le Gouvernement d’Elizabeth Borne et Emmanuel Macron sont perdants aussi, quelqu’en soit l’issue lors du passage au sénat et ensuite. Le choix d’une procédure de type 47.1 après la succession de 49.3 renforce l’image d’une gouvernement autocratique sourd et aveugle. Le fait d’avoir menti sur le montant minimum ou sur les pertes pour les femmes dévalorise aussi une parole officielle déjà bien abîmée lors de la séquence SARS-CoV2. On ne peut plus croire ce qu’ils disent et c’est très grave. Le semblant de dialogue, appelé concertation n’est évidemment qu’un effet de communication car ce ne sont que des mesurettes coûteuses qui ont été lâchées, donnant une réforme sans gain économique et faisant payer toujours les mêmes, les travailleurs modestes.

Les perdants suivants sont… La France Insoumise. En choisissant une stratégie d’obstruction systématique, elle rate totalement l’objectif. Le mouvement de Jean-Luc Mélenchon a perdu toute crédibilité du fait du traitement médiatique très prévisible. En effet, on a vu lors de la campagne présidentielle que la moindre erreur se paye cash. L’affaire Quatenens en fut aussi un exemple. Le mouvement se divise peu à peu sur le chemin à suivre. Il va être compliqué de plaider la cause de LFI lors de prochaines élections car la stratégie employée n’a amené aucun résultat. Pire, elle a fait passer l’ensemble des députés LFI pour des trublions insultants, alors que la réalité est bien plus nuancée. On peut heureusement faire ressortir des personnalités LFI dans ce marasme, comme François Ruffin, Aurélie Trouvé, Rachel Kéké, Clémentine Autain. Les perdants sont la petite cour de JL. Mélenchon qui ferait bien de se refaire une santé dans son nouvel Institut la Boétie.

La NUPES, par effet de bord, sort perdante. Pourtant, le comportement du PS et d’EELV n’est pas en cause. Mais en ne soutenant pas toujours leurs alliés ou en choisissant trop tardivement de sortir de la stratégie de groupe, on voit les limites de cette alliance. Les élections internes des deux formations furent aussi houleuses et n’augurent pas d’une unité sur ces 5 ans. Rien que les européennes à venir le montrent déjà.

Les LR sont encore perdants en ne sachant pas où se situer. Pire même, ils réussissent à se diviser encore un peu. Ils semblent négocier des broutilles et ont peur de la dissolution de l’assemblée. Cela les empêche de voter la moindre motion de censure, même si politiquement cela paraîtrait plus logique.

Le Parlementarisme est perdant. Il faut quand même rappeler que les outrances et insultes sont coutumières dans l’histoire de l’assemblée. Cela donne parfois l’impression d’une cour d’école, voire de maternelle mais ainsi en est-il de l’humain avec les effets de groupe et les pouvoirs. La manière de gérer le règlement est aussi problématique quand on ne sanctionne pas un salut nazi, qu’on sanctionne des propos racistes mais aussi une blague un peu potache autour d’un ballon. Quant à qualifier le ministre Dussopt d’assassin, c’est un peu anticiper les effets de la réforme…Mais sans doute un peu plus réaliste quant on regarde les décès dans le monde ouvrier. Alors avec les petites manigances des Renaissances avec leurs nouveaux amis du RN, on a encore de belles chances de voir encore l’image de l’assemblée tomber plus bas encore.

La démocratie est largement perdante. Comment pousser des gens à voter après ça? On ne voit aucun impact de l’opposition sur le projet. On ne voit aucune écoute de la majorité par rapport à 3/4 de la population opposée à la réforme. On ne comprend déjà pas pourquoi un candidat représentant à peine 20% des votants pourrait imposer quoique ce soit. Alors il va être encore plus compliqué d’obtenir de la représentativité tant dans la présidentielle que dans de prochaines municipales ou législatives. Je ne vois pas personnellement comment expliquer les positions de la NUPES ou LFI non plus, aux personnes que je rencontrerai.

Le RN est il perdant ? Pour un observateur attentif, je dirai oui car le parti de Marine Le Pen n’a pas montré d’opposition frontale au projet de Macron et Borne. Il n’y eu qu’une timide motion de censure pour clôturer cela. Mais le fait de ne pas faire de vague reste dans la stratégie de respectabilité de Mme Le Pen et vise à grignoter encore des voix lors des prochaines échéances. Après tout, c’est sans rien faire qu’elle a eu autant de députés, bien aidée par les sortants Renaissance et les dissidents du PS.

Maintenant, j’ai peur que cela dégénère dans tous les sens puisque plus personne n’écoute ses concitoyens et surtout le bon sens. Un bon sens qui dans le contexte actuel voudrait une plus juste répartition des richesses et une évolution de la vision du travail par rapport à cela. Mais quand on a encore un gouvernement qui vit au 19ème siècle, pas évident de voir l’avenir.


Ecrit le : 18/02/2023
Categorie : reflexion
Tags : réflexion,politique,france,retraites

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