BD - Arkham Asylum de Morisson et McKean (1989)

Batman, vous connaissez forcément, tant DC Comics et les studios hollywoodiens nous ont abreuvés de sorties plus ou moins réussies. Et si je dis Arkham, il y a des chances que vous pensiez à la ville fictive de l’univers de Howard P. Lovecraft. Mais quand l’un rencontre l’autre, ce ne peux être que dans un asile.

Nous sommes pourtant bien à Gotham, la mégalopole habituelle où Batman combat le crime. Tout ça vient du choc de la mort de ses parents, assassinés lors d’un vol. Et le milliardaire Bruce Wayne de devenir le justicier masqué le plus énigmatique. Pourquoi la chauve-souris ? Pourquoi cette lutte sans merci ? Cette dualité qui lui pèse ? Mais là où l’histoire devient intéressante, c’est lorsque les ennemis de Batman se trouvent internés après leur arrestation dans un asile fondé par un certain Arkham, lui aussi héritier d’une famille qui dédia sa fortune à soigner la folie. Arkham Asylum, c’est l’histoire de cet Amadeus Arkham et aussi celle d’une prise d’otage par les patients de cet asile. Cela va amener Batman à se confronter à sa propre histoire, sa propre folie.[

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Ce “one shot” aurait pu n’être qu’un album parmi d’autres s’il n’avait été particulièrement gaté par ses auteurs. Il y a donc l’histoire de Grant Morisson, très habile avec sa dualité qui fait écho à celle de Batman mais aussi à d’autres histoires parmi les méchants comme Joker, Double Face par exemple. Mais il y a surtout la mise en image de tout cela par Dave McKean. Si Frank Miller avait déjà donné un coté sombre au personnage dans son “Dark Knight” en 1986, ici on franchit encore une étape avec un découpage et une mise en page qui brise les règles habituelles du comicbook. On est plus dans de la peinture, avec un fond très travaillé, des vignettes ciselées avec des couleurs savamment choisies, dégradées, des flous, … Le Joker a droit à une écriture particulière, en rouge tandis que les bulles de Batman sont noires.Tout cela nous plonge déjà dans une ambiance sombre, pesante et violente. La Joker ne plaisante pas dans ses menaces, du moins le pense-t-on.

Et puis il y a les autres “patients”, cette petite société du crime qui s’organise dans l’asile pour accueillir leur ennemi comme il se doit. le Alice de Lewis Caroll n’est jamais loin non plus, notamment parce qu’il y a aussi le Chapelier fou… Je connaissais moins Docteur Destin et quelques autres mais ça n’est pas si grave. C’est un album qui fascine par sa noirceur mais aussi l’histoire de cet Amadeus Arkham, son père, sa mère ou son épouse. Je ne vais pas dévoiler son histoire ici car c’est aussi tout le sel de cet album remarquable tant par le fond que la forme. Le défaut de l’album c’est finalement qu’il reste court, à peine 90 pages, même si des éditions collectors donnent plus de matière encore. Mais l’énergie qui en ressort est telle que faire plus long aurait dilué le propos. Il n’y a qu’à voir la couverture de la dernière édition française en date pour comprendre. Avec cet album, Batman gagnait un nouveau “reboot” qui donnera naissance à une de ses meilleures adaptation vidéo-ludique. Il y aura également des “suites” par d’autres auteurs que ce duo mais aucune n’atteindra la dimension de mythe de celui-ci.

Je suis étonné du fait que les années ne pèsent pas trop sur ce dessin. En effet, souvent la mise en couleur trahit l’âge d’une comicbook mais là, même le découpage reste d’actualité, montrant à la fois la richesse de la BD mondiale mais aussi le conservatisme qui règne encore. On pourrait comparer cela aux “Chroniques de la lune noire” des débuts avec Olivier Ledroit au dessin. Heureusement, cela reste ici cantonné à ce seul album largement édité dans différentes versions. Pour qui est prêt à ce combre voyage dans la folie humaine, dans la noirceur de Batman, et quelque part nos propres folies, c’est un ouvrage majeur. Pour d’autres, ça restera au mieux un bel objet…Et comprenez alors que j’ai du mal avec certaines adaptations cinématographiques même parmi les plus cotées. 1989, ce fut l’année du premier film de Tim Burton….Et peut-être y-a-t-il une influence sur le second ?

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Ecrit le : 16/05/2023
Categorie : bd
Tags : bd,1980s,comics,superhéros,folie

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